Le règne de l’impunité dans un Etat de terreur, un jeune togolais torturé par les forces de sécurité sans aucun motif. Voici son témoignage.

6 05 2013

La scène se passe dans la nuit du 04 au 05 mai 2013. Enlevé aux environs de 19H15 par les hommes en uniforme. Ce jeune togolais, la trentaine bien remplie n’a été relaxé que ce dimanche vers les 15H, après qu’un de ses cousins eu réussi à défoncer sa porte et amener sa carte d’identité aux dieux du Commissariat Central de la ville de Lomé. Lecture.

DSC00363En fait hier, j’ai été kidnappé par quelques hommes habillés en noir avec des masques sur leur tête.

Je quittais à pied le bar resto la « rumba »situé sur le boulevard, pour la maison vers les 19h15. Pour un court chemin, je suis passé juste devant le commissariat central, à la  traversée de la chaussée sur le côté du trottoir de la BOAD, juste à 30m, il y avait des hommes habillés en noir avec leur masque et juste devant eux, leur chef de troupe avec une casquette habillé lui en tenue civile.

Quand j’ai dépassé le chef de troupe en marchant, il fera ordonner à ses éléments de m’interpeller. Du coup, deux hommes masqués  tout en  noir s’approchaient de moi. Le chef poursuit et leur dit encore de me fouiller. C’est là que je lui demandais juste à 5mètres de distance à savoir si c’est à moi il s’adressait ? Il me répond: « Imbécile, mal appris c’est à moi que tu parles comme ça? Embarquez-le. »

Du coup, ces deux (02) hommes commencèrent par me fouiller de la tête jusqu’au pied. Dans ma poche, j’ai la clé de ma chambre, 150 FCFA et une boîte d’allumette que j’ai dû oublier dans ma poche avant de sortir de la maison puisque ma mère se sentait mal à l’aise et m’a demandé de lui faire de l’eau chaude pour son bain.

Par rapport à leur réaction brutale et sauvage, j’étais vraiment ému puisque je n’ai jamais assisté à une scène pareille où des gens sensés faire votre sécurité vous enlève en pleine rue sans aucun motif.

Comme ils commençaient par me violenter je suis  finalement rentré dans leur véhicule de couleur bleu-blanc. Entre temps ils ont été rejoint par un autre élément donc ils étaient trois (03) à m’avoir molesté avant que je ne me retrouve dans leur véhicule.

Quelques minutes après, je me suis retrouvé dans  l’enceinte du commissariat central et à ma descente du véhicule, j’ai été bien molesté par un policier  qui m’a giflé à deux reprises sans que je n’ai même pas bronché avant de me faire  rentrer dans le hall où sont gardés d’autres citoyens.

Dans le hall, il me dit de m’asseoir par terre d’où déjà quelques nigériens, et togolais étaient déjà en position quatre pattes, celle d’un bébé qui apprend à faire ses premières pas. Tout le monde était à terre. Il y avait au moins une dizaine de policiers: tout en noir, en tenue civile et en tenue de policiers.

Je suis resté dans cette position accroupie jusqu’au moment où un agent au comptoir me demanda de le rejoindre à son bureau où il se tenait et du coup il me demanda de décliner  mon identité.

Je n’ai pas hésité à lui donner les informations qu’il voulait. Je lui demandai à mon tour de savoir ce que j’ai fait pour se retrouver au commissariat et se voir molesté sans aucune raison ? Ce dernier n’a pas tardé à me répondre par des insultes et fait dire à d’autres éléments dans le hall de me mettre plus au fond de la salle pour que je puisse sentir la chaleur caniculaire qu’il faisait là.

Je ne m’attendais pas du tout à ça surtout qu’il n’a pas pu me donner une  réponse valable sur mon enlèvement.

N’en pouvant plus de rester accroupi je me suis levé et je les observais tous et en même temps je commençais à avoir une envie de me défendre.

De là j’ai continué à poser la même question à celui qui m’avait enregistré au prime abord; ce dernier n’a pas du tout digéré ma question  et m’ordonna violemment de m’asseoir. Je me suis entêté comme s’il ne me parlait pas et du coup derrière moi un autre en masque m’a donné trois (3) coups de cordelette dans le dos et me demanda si je ne comprenais pas la langue dans laquelle son supérieur me parlait?

Je me tournai et lui demanda si cette façon d’agir était bien? Il me rendra quelques coups de pieds sur ma jambe et mon tibia et continua à me dire de m’asseoir.

De là je lui ai dis en présence de la quatre vingtaine de personne qu’ils ont arrêté dans cette nuit du 04 au 5mai 2013 que je ne vais point m’asseoir puisque je suis fatigué de rester accroupi.

Alors là ils étaient cinq (05) à me bastonner comme un chien. Je ne sais où j’ai trouvé la force de vous raconter ma mésaventure car j’ai mal partout et je n’entends plus de l’oreille droite tellement les gifles et les coups de poings n’ont cessé de pleuvoir sur moi.

Disons que j’ai été copieusement « grillé » avec un cousin qui lui aussi était prit dans les environs de la grande poste avec quatre (4) de ses amis. En somme,  j’ai au moins 5 ou 6 personnes qui pourront témoigner de  tout ce que j’ai vécu dans cet horrible commissariat.

Ils nous ont enfermés dans les grilles et à chaque 20 ou 30minutes, ils nous font parcourir les 2 grilles du hall juste pour nous emmerder.

L’enregistrement apparemment n’étant plus valable, nous avons de nouveau été présenté devant une femme policier qui à  nous a enregistré sauf  qu’elle  aussi n’a pas pu nous dire le pourquoi nous étions là.

Il y avait un agent qui m’a  demandé si j’avais ma carte d’identité sur moi? J’ai dis non et là il me dit que c’est pour ma carte d’identité que j’étais là. Donc c’est à cause de ma carte d’Identité que j’ai été violemment molesté. Pourtant ma carte je l’avais établie dans ce commissariat et je pense bien que si je ne l’avais pas sur moi et que je disais que c’était là que je l’ai faite, le bon sens voudrait qu’ils cherchent dans leurs documents pour être en possession de toutes les informations dont ils ont besoin.

La suite est encore plus longue et je préfère m’en arrêter là pour l’instant.

J’ai décidé de témoigner à visage découvert malgré tout en mesurant les risques et les dissuasions de part et d’autre, mais je ne peux me taire sur cette injustice et cette impunité révoltante. J’ai eu d’ailleurs à leur dire à haute et intelligible voix que j’informerai la presse dès ma sortie et là l’un d’eux m’a lancé, « on s’en fou, on peut même tous vous tuer et personne ne nous demandera des comptes ». J’ai été profondément choqué de la réaction des hommes qui ont des réflexes animaliers comme si le Togo était une jungle. C’est triste pour le Togo.

Voilà le pays dans lequel nous sommes et les mots me manquent pour dire toute ma rage mais je suis décidé à aller jusqu’au bout et si les autres qui ont été enlevés préfèrent se taire par peur, moi j’ai décidé de porter à la connaissance du public le danger que nous courrons dans ce pays où en pleine rue tu peux être enlevé, torturé et peut être trouvé la mort sans que rien ne se passe. Je ne peux le supporter et je ne peux me taire.

Je vais en rester là pour le moment.

MENSAH D. Ata Combey.

 


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Une réponse

6 05 2013
Hboris Aouissi

**DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME AGISSEZ SVP…**
VOTRE SILENCE EST TROP ASSOURDISSANT.MERCI

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