Neuf (09) mois d’exil forcé pour le journaliste togolais Félix Nahm Tchougli.

30 09 2014
F.Nahm

F.Nahm

Comme le commandant  Olivier Amah Poko, parti pour s’échapper des griffes  d’un doyen des juges d’instruction qui l’attendait sans doute pour l’envoyer de nouveau en prison  après plusieurs séjours injustifiés dans l’enfer  carcéral de Faure Gnassingbé,  Félix Nahm a dû quitter le Togo quelques mois plus tôt pour éviter une détention arbitraire. Le sort lie ces deux personnes, plus que le sort, une interview les lie. Une interview devenue une pilule amère pour un pouvoir monarchique qui ne peut l’avaler. L’interviewé et l’intervieweur doivent être envoyés en prison. Les consignes sont données, les juges connaissent le job conformément au désir des apparatchiks du pouvoir togolais.

Ironie du sort le commandant Olivier Amah,  a fait la prison sous le fallacieux mobile d’une interview qu’il a accordé à radio légende dans laquelle il demandait à l’armée de jouer sa partition pour un règlement de la crise socio politique qui secoue le Togo depuis des décennies, comme feu Général Eyadema l’avait préconisé sans qu’il ne soit jeté en prison.

Crime de lèse-majesté sous son fils Faure,  le commandant Amah est jeté en prison pour incitation de l’armée à la révolte. Ironie du destin, l’interview est l’œuvre de Félix Nahm, journaliste à radio légende à l’époque, il  reçut à son tour son lot de convocations à comparaitre. La convocation de décembre devrait être celle qui devrait lui  conférer le statut de détenu. Informer par certaines sources Félix Nahm sur conseil de plusieurs personnes dont son président directeur général déjà hors du pays et convoqué aussi, a dû quitter le Togo pour un exil imprévu et pénible.

Félix Nahm, faisait partie de la très jeune et dynamique équipe de la radio légende FM, fermée le 25 juillet 2013 jour des élections législatives pour entre autre diffusion de fausses nouvelles. Les mobiles pour réduire en silence ce média qui gêne sont ailleurs et le pouvoir togolais par le biais de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC), institution de musellement de la presse non alignée cherchait la petite bête. L’équipe rédactionnelle a-t-elle manqué de tact et de flair  pour ne pas voir le piège venir ? Avec les multiples menaces dont la radio et son personnel faisaient face les uns et les  autres marchaient déjà sur les œufs tout en gardant une ligne éditoriale et un ton dans le traitement de l’information que la dictature du fils du père ne supportait guère.

D’autres voix se sont élevées pour accusées l’équipe de la rédaction d’avoir participé au scénario qui a conduit à la fermeture de légende. Nous retenons  que c’est bien la HAAC qui a procédé à la fermeture illégale de cette station et comme tel, elle est la première responsable d’une telle dérive qui n’a que pour objectif de faire taire les médias qui gênent. La preuve, la liste des médias muselés au Togo de Faure ne fait que s’agrandir.

Félix Nahm en exil, est  une victime de la dictature mais aussi une victime de nombreuses campagnes de dénigrement tendant à le présenter comme un otage consentant ou comme un collaborateur de la dictature. Les campagnes de dénigrement constituent le nouveau job de certains togolais, des fois, ils font partie de ceux qui disent incarner une certaine figure de combat pour un Togo libre. Le montage est simple, des faits vous sont reprochés alors même que vos accusateurs  n’ont aucun début de preuve pour soutenir leur thèse, c’est aussi cela le Togo et Félix Nahm le sait encore plus depuis que des personnes interrogées par des institutions internationales n’ont trouvé mieux que de faire des témoignages pour noircir son parcours et balayer d’un revers de main le rôle que ce journaliste a pu jouer pour informer l’opinion et  contribuer modestement à l’avènement d’un Togo démocratique où la liberté de presse ne doit plus être confisquée dans les mains d’une tyrannie qui ne veut que d’une presse soumise et alignée à une cause indigne. Ce n’est certainement pas l’effet d’un hasard quand Félix  a commencé par finir ses éditions de journaux par cette pensée, «  l’estime des autres est préférable à l’or et à l ‘argent ».

En effet,  suite aux incendies des marchés du Togo, notamment ceux de Kara et de Lomé, plusieurs militants de l`opposition ont été arrêtés puis détenus à la gendarmerie de Lomé. Le 09 mai 2013 un des détenus, Etienne Yakanou, a rendu l’âme dans l’enceinte de la gendarmerie  faute de soins devant sa femme  suite à une injection d`un produit dont on ignore la nature. Le 10 mai Le journaliste Félix Nahm-Tchougli Lapoumba,   accorde une interview à la femme du détenu décédé. Cette dernière donne les détails de la disparition tragique de son mari.  Dans cet entretien, Madame Yakanou a accusé le directeur du Service des Recherches et d’Investigations (SRI), le capitaine Akakpo  et son équipe d’avoir laissé son mari mourir au lieu de le sauver. Après la diffusion de cette interview monsieur Nahm a reçu des coups de fil anonymes de menaces de mort. Pratique bien connues des journalistes taxés de critiques à l’endroit du régime togolais.

Le 18 mai 2013, lors d’une marche organisée par l’opposition, Félix Nahm interroge le commandant Olivier Amah sur l’actualité socio politique du Togo. Un crime pour les tenants du trône présidentiel. Le commandant est convoqué chez le doyen des juges d’instruction et déposé contre toute attente à la prison d’Atakpamé. Quelques jours plus tard Félix Nahm reçut sa convocation du SRI, il devrait se présenter le 28 mai 2013. Il se présente en compagnie de ses avocats maîtres Jil Benoit Afangbédji, Zeus Ajavon, et du rédacteur  en chef de légende au moment des faits, Rodrigue Lawson. A ce rendez-vous curieusement Félix n’a pas été interrogé mais  deux nouvelles convocations lui furent délivrées,  une pour le PDG de la radio, monsieur Flavien Johnson et la seconde pour lui-même.

Le 26 août 2013, les convoqués se présentent de nouveau à la gendarmerie. Rien n’a filtré à cette seconde comparution non plus.

Le 09 décembre 2013, une source alerte Félix Nahm de faire très attention car le dossier du commandant Olivier Amah sera rouvert et qu’il sera convoqué par le juge qui va l’inculper pour complicité d’incitation au crime et Nahm devrait être déposé pour sa part à la prison de Mango. La prison de Mango est souterraine et de sinistre réputation. Les pensionnaires de ce Guantanamo togolais version pire ont perdu la vie ou la vue.

Le 11 décembre 2013, une autre source confirme l’information et conseille au journaliste de quitter le pays avant qu’on ne l’envoi en prison. C’est ainsi que le 16 décembre 2013, Félix Nahm reçu par voie d’huissier deux nouvelles convocations pour monsieur Johnson et lui-même à comparaitre par devant  le juge d’instruction Adjoli Awi  le 18 décembre.

Le 17 décembre 2013 à la sortie de la messe, Félix Nahm  constate que deux individus en civil le suivaient. Il  informa certains confrères de la situation. Il contacte également  certaines personnalités dont Monseigneur Nicodème Barrigah, le président de la Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR) qui était très inquiet  au regard de certaines  informations. C’est à ce moment que  Félix Nahm  pris la décision de quitter le Togo.

Les deux individus qui semblent élire domicile dans son quartier le suivaient toujours. Félix Nahm  fait semblant de rentrer dans une boutique d’où il sorti par une autre porte et  quitta de ce pas  le Togo.

La nuit du 17 décembre il l’a passé certes dans un autre pays loin de ses persécuteurs mais  dans la rue. C’est au petit matin qu’il a pu contacter un ami qui le rejoindra plus tard pour certaines formalités dans le pays hôte où après interrogatoire il est enregistré avec un statut de réfugié.

Craignant d’être repéré, son ami ne pouvait l’accueillir chez lui, il l’envoi chez l’un de ses proches  qui vit à des milliers de kilomètres de chez lui.

Le 19 décembre 2013 l’ami de Nahm est informé que deux togolais sont arrivés à la recherche d’un journaliste avec la photo de Félix. « Même loin de mon pays j’ai gardé mes réflexes de prudence et de vigilance pour échapper à des individus qui  essayent de me repérer ». Nous confie-t-il depuis son refuge.

Sur le cas Nahm Tchougli, plusieurs organismes enquêtent sur ce dossier et sont rentrés en contact avec des acteurs de la presse et d’autres personnes qu’ils jugent utiles pour l‘aboutissement de leur investigation.

Il nous revient que dans les échanges avec ces organisations, certains togolais contactés  y ont encore trouvé un moyen de dénigrer le confrère comme nous savons si bien le faire par ici. C’est ainsi que le commandant Olivier Amah à sa sortie de prison a été contacté par un des organismes en question sur cette fameuse interview et les conséquences qu’elle continue d’engendrer. Ses réponses ont sans doute aidé cet organisme à tirer le vrai du faux.

Certaines mauvaises langues l’ont annoncé à Baguida, d’autres à Téma, d’autres encore à Lagos oubliant que Félix est juriste de formation et qu’il maitrise les procédures de demande d’asile. Aujourd’hui il a toutes les preuves pour montrer qu’il n’a jamais été ni à Téma ni à Baguida ni à Lagos.

Cette mésaventure de Félix Nahm doit interpeller toute la presse ainsi que les organisations de presse du Togo car les autorités du pays qui ont accueilli notre confrère n’ont pas caché leur stupéfaction face à certains écrits.

Seul constat à ce jour, en plus de Félix Nahm, les trois premiers responsables de légende FM ne sont pas au Togo au moment où nous rédigeons cet article. Il est évident,  qu’ils ne vont pas revenir de sitôt.

La liste de ceux qui pour diverses raisons sont obligés de  quitter le Togo pour sauver leur peau et ne pas se voir confisquer la liberté qui n’a pas de prix s’allonge sous Faure Gnassingbé.

Ces fugitifs tout comme la majorité des togolais sont condamnés  à prier pour un départ rapide de ce régime cinquantenaire qui étrangle tout sur son passage.

« L’exil est une espèce de longue insomnie », soutenait à raison Victor Hugo.

 

 


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